Origine...
Le cassis aime le froid, c’est une plante
originaire du nord de l’Europe, de l’Eurasie, et du continent
nord-américain.
On le trouve sous toutes les latitudes élevées de
l’hémisphère Nord, et c’est sans doute de Scandinavie qu’il a
commencé à s’étendre et à descendre progressivement vers des régions
plus tempérées.
Les auteurs les plus anciens le mentionnent en Grande-Bretagne, en Laponie, en Suède, en Norvège, en Russie, en Sibérie, dans les Alpes, au Mont-Cenis, en Suisse, en Auvergne, en Pennsylvanie et jusqu’en Mandchourie en Mongolie, au Cachemire, au Tibet et au Kamchatka. Il pousse jusqu’à 2000-3000 m d’altitude et on le trouve è l’état sauvage, dans les bois, les haies et les fonds de vallée. Il résiste jusqu’à - 40°C, aidé en cela par sa petite taille : la neige le recouvre et le protège des dommages du grand froid dans l’extrême Nord...
Famille...
Le premier à avoir donné une famille au cassis, est le naturaliste
suédois : Carli von Linné (1707— 1778). Le cassis fait partie de la
tribu des Ribésiacées (Ribes), qui contient environ 150 espèces. Son
nom latin est Ribes nigrum.
Traditionnellement placé dans
la grande famille des Saxifragacées, qui comporte beaucoup de
plantes ornementales, certains phylogénistes l’en ont sorti dans les
années 1980 pour le classer dans sa propre et véritable famille, les
Grossulariacées, elle-même divisée en 7 sous-familles.
De fait, c’est un groseillier et ses cousins sont les groseilliers à
grappes blancs ou rouges (Ribes rubrum) ou encore à
maquereau (Ribesgrossularia). Récemment, des groseilliers à
maquereau ont été hybridés avec des cassis pour produire un fruit,
le Jostaherry ou Casseille...
Éthymologie...
C'est en 1561, dans un livre sur la chasse, écrit par un Poitevin,
Jacques du Fouilloux, "la Vénerie", qu'apparaît pour la première fois
le mot “cassis” (réédition de 1844). Auparavant, le cassis
s’appelait Poyvrier, en raison de ses fruits noirs et peut-être
aussi à cause de la puissance aromatique de ses feuilles ou
bourgeons. “Cassis” vient donc du dialecte poitevin, dérivé de
“casse” (du grec kassia, devenu casse, fausse cannelle - en
latin), car employé au Moyen Âge comme substitut de la casse.
Paul Contant, apothicaire de Poitiers, fut l’un de ses premiers
promoteurs (1628), et Buchoz, dans son Dictionnaire des plantes
(1770), l’appela “Cassis” ou “Cassetier des Poitevins”.
On ne trouve
aucune présence du nom “Cassis” dans les anciens dictionnaires de
l’Académie. ni dans les premiers ouvrages sur la langue française
parus en 1680 et 1690. Il n’apparaît dans les livres de botanique
que vers le milieu du XVIIIe siècle. En 1808, la boisson faite avec
le fruit porte pour la première fois le nom de “Cassis”.
Désormais
ce terme signifiera à la fois la plante. le fruit (1860) et la
boisson
Singulier destin pour ce nom provenant d'un ancien patois régional
d’une province française... C’est grâce à la distribution mondiale
que progressivement le nom de cassis s’impose dans le monde entier.
Il n'est pas rare de le voir se substituer au Blackcurrant
anglais ou Johannisbeere allemand.
Histoire...
Les grandes civilisations méditerranéennes, égyptiennes, grecques ou romaines, ne connaissaient donc pas le cassis. Seuls les Romains auraient pu le rencontrer pendant la période du Grand Empire lorsqu'ils ont atteint l’Écosse. Nul doute qu'à l’époque, ils avaient d’autres centres d'intérêt que la botanique...
Au XIIe siècle, il apparaît pour la première fois en Allemagne, sous la plume d’Hildegarde de Bingen, haute figure spirituelle de l’époque, dans le Livre des subtilités des créatures divines, où elle recommande l’utilisation de ses feuilles afin de guérir la goutte. En 1508, on le retrouve dans le “Livre d’heures d’Anne de Bretagne”, avec une gravure enluminée le représentant sous le nom de Poyvrier d'Hespagne.
En 1561, le poitevin Jacques du Fouilloux le baptise et officialise pour la première fois le nom de cassis en le recommandant pour soigner les chiens de chasse mordus par les vipères.
En 1571, Gaspard Bauhin le mentionne comme fruit de table, un témoignage bien isolé.
En 1628, l’apothicaire de Poitiers, Paul Contant, le décrit précisément dans “Du groseillier noir au cassis”.
Fin du XVIe siècle, les émigrants introduisent au Canada et en Amérique les premiers plants européens. Mais, auparavant, de nombreuses tribus amérindiennes connaissaient déjà les vertus des variétés indigènes de cassis de la partie nord du continent. Elles utilisaient les racines en infusion pour leur médecine.
En
1712 à Bordeaux, l'abbé P. Bailly de Montaran, docteur en
Sorbonne, édite chez P. Albespy ,
imprimeur et libraire, une brochure intitulée “Les propriétés admirables du Cassis qui a la propriété de guérir
plusieurs sortes de maux”.
En 1746, de retour de chasse, le jeune roi Louis XV s’arrête à l’auberge du Cygne, 11 rue PaulChatrousse à Neuilly. On lui sert le fameux ratafia. Le roi apprécie cette boisson et la met à la mode. Un siècle plus tard, le ratafia de Neuilly jouera un rôle déterminant dans le destin de la crème de cassis.
En 1782, la liqueur de cassis par fermentation est signalée dans le nord de la France. La même année, Legrand d’Aussy témoigne de la formidable réussite des ratafias.
En 1782 toujours, Jean-Francois Durande, recommande enfin ses feuilles et branches comme diurétiques et contre les douleurs de rhumatisme et les fièvres de printemps...
Dès le XVIIIe siècle, en dehors des infusions et ratafias réalisés è partir des feuilles en tant que panacées, le cassis commence à avoir une autre fonction: la liqueur, ou ratafia, dégustée pour le plaisir. Les rééditions plus ou moins enrichies ou amendées du traité de l’abbé Bailly de Montaran avaient vulgarisé les premières recettes.
En 1817, l’Hermite de la Chaussée d’Antin étudie les mœurs et les usages parisiens au commencement du XIXe siècle. Il témoigne de l’enracinement du cassis dans la capitale.
De 1833 à 1842, le grand romancier Honoré de Balzac, le met en scène. Il est présent dans la “Comédie humaine”, peinture sociale de la France de la première moitié du XIXe siècle.
Le 18 août 1841, 2 Dijonnais, Auguste-Denis
Lagoute et son distillateur Claude Joly, font un voyage à Paris.
La date de ce voyage est connue précisément car il fallait à
l’époque un passeport pour circuler à l’intérieur de la France.
Originaire de Langres, Auguste-Denis Lagoute s’était d’abord
établi comme cafetier à Dijon, puis comme liquoriste. Lors de ce
voyage à Paris et à Neuilly, Lagoute et joly sont impressionnés
de l’importance de la consommation de cassis dans les épiceries,
auberges et cabarets, ainsi que celle du fameux ratafia de
Neuilly... De retour à Dijon, Lagoute et Joly découvrent que le
cassis est l’élément aromatique essentiel du fameux ratafia,
composé d’un mélange d'eau-de-vie et de différents fruits et
d'épices.
Ils décident de fabriquer de fabriquer la liqueur de
manière industrielle.
Le destin du cassis bascule.
Cette
tradition sera reprise par les maires successifs, et dure
encore. En attendant, pour de longues années encore, on l’appréciera
sous forme
de cassis à l’eau, vermouth cassis, ou mêlé-cass.
Le cassis est désormais célèbre dans le monde entier On le déguste et l’utilise sous de nombreuses formes. Les médicaments et les parfums à base de la plante se multiplient... |
Fabrication industrielle...
Au moment de la récolte, les fruits mûrs sont tout d’abord
broyés puis versés dans une cuve. On les recouvre immédiatement
avec de l’alcool surfin. La cuve est ensuite hermétiquement
fermée, sous vide d’air de préférence.
Ces cuves, d’abord
foudres en bois, sont aujourd’hui remplacées par des cuves en
inox qui préviennent tout risque d’oxydation et permettent
d’obtenir des crèmes de meilleure qualité.
Le mélange de fruits et d’alcool est agité puis laissé au repos
environ 5 semaines.
Après le soutirage du premier jus, dit “jus
vierge” ou première infusion - il est possible de recharger la
cuve en alcool, le marc des fruits étant encore riche, et de
refaire une macération. On obtient, quelques semaines plus tard,
une deuxième infusion. Pour certains marchés à bas prix, on
recommençait l’opération afin d’obtenir une troisième infusion,
de qualité inférieure, que l’on renforçait généralement avec une
infusion de bourgeons.
L’infusion alcoolique de cassis, mélangée avec du sucre,
saccharose ou glucose, dans un malaxeur, donne la crème de
cassis.
Liqueurs
“maison”...
Nombreux sont ceux qui fabriquent encore de nos jours, dans leur
cuisine, avec les fruits de leur jardin, des liqueurs de ménage.
Une grande quantité de recettes existe, en voici 2 :
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Ne pas oublier que
le cassis ne gagne pas à se faire vieux !
Quelques cocktails
& recettes ...
On peut savourer la crème de cassis de nombreuses manières. En
cuisine, on l’a déjà mariée aux:
•
Entrées : avec du melon, en
salade avec des betteraves rouges.
•
Poissons : avec du sandre par exemple.
• Viandes : porcelet, jambon, lapin, canard (magrets), pigeonneau.
• Gibier : cerf, chevreuil, bécasse.
•
Fromage : chèvre frais, yaourts ou fromage blanc.
• Fruits : poires, pêches, pommes, oranges, rhubarbe, groseilles,
fraises, framboises, figues.
•
Confitures :framboises.
•
Desserts : bavarois, clafoutis, crêpes, tartes, charlottes,
savarins, vacherins, amandines, macarons, crèmes soufflées et
glacées, sablés, profiteroles, nougats glacés, sorbets, compotes.
Et bien sûr on la déguste en apéritif, digestif ou encore dans
un cocktail...
BANVILLE, 8° VAN GOGH'S ANTI-INSANITY LEMON TONIC, 30°° APRÈS LE BAL, 0° SALADE DE CREVETTES, BETTERAVE-CASSIS “CRUMBLE” D'ÉTÉ AUX GROSEILLES ET FRAMBOISES |
Félix
Adrien Kir
(1876-1968), ordonné prêtre en 1901,
s'intéresse à la politique dès 1924 et s'initie à la
contradiction oratoire, dans laquelle il excellera... Devenu
maire de Dijon après la seconde guerre mondiale, il sera
député de la Côte-d'Or de 1945 à 1967.
C’est
vers 1950 que la presse commencera à utiliser le nom du
chanoine pour dénommer un vin blanc-cassis. Qui le premier
en eut l’idée? Sans doute des journalistes parisiens qui
avaient remarqué l’habitude du député maire de Dijon de
réclamer
sa boisson favorite au bar de l’Assemblée nationale. Le
chanoine a
laissé faire et l’usage s’est répandu.
En 1951, le 20
novembre, le chanoine écrit
:
“je
déclare donner en
exclusivité à la
maison LejayLagoute
le droit d’utiliser
mon nom pour
une réclame
de cassis dans la forme
qui lui plaît, et notamment pour désigner un vin
blanc-cassis.”, 4
mois plus
tard, cette maison dépose
la marque “Un
Kir” au Tribunal de commerce de Dijon.
En
mars 1960, suite à la rencontre entre Nikita Khrouchtchev et le chanoine
Kir à Dijon, les cafés
dijonnais proposent un “double K” (vin blanc-cassis-vodka)
!
Pendant plus de 20 ans, le chanoine, ecclésiastique
pittoresque, homme politique truculent et rabelaisien
consacré, va faire connaître le blanc-cassis au monde
entier, finissant même par lui donner son nom !