Au pays de François Rabelais et d’Anthelme Brillat-Savarin, la cuisine est déjà depuis des siècles un véritable mode de vie.
Les Français ont développé l’art de se nourrir jusqu’à en faire un modèle de subtilité, de variété, de raffinement et aussi d’élégance.
Cependant, la variété des produits ne peut suffire à expliquer le prestige de la cuisine française.
La cuisine française a influencé toutes les cuisines du monde occidental, au point de devenir un symbole international de qualité et de prestige.
Par quels cheminements la France est-elle devenue le berceau de la gastronomie?
Certes, ce “beau pays” bénéficie d’un climat tempéré et ses régions sont d’une extraordinaire variété. De la montagne à la mer, en passant par les plaines et les vallées, “l’Hexagone” offre une somptueuse palette de paysages et de produits de toutes sortes.
Carrefour de populations très diverses : Celtes, méditerranéennes ou germaniques, pour n’en citer que quelques-unes, la France est ainsi devenue progressivement, le creuset d’influences et de cultures donnant le jour à ce qu’il serait possible d’appeler :
“ l’Homo gastronomicus”.
Les Romains, installés en colons, ont marqué leur contribution par l’apport de 2 produits essentiels :
Ils ont également encouragé la culture du blé, modifiant ainsi progressivement les habitudes alimentaires des Gaulois (Celtes), plutôt amateurs jusque là, d’orge et de seigle.
La grande tradition culinaire des Romains, développée dans le monde antique sur le pourtour de la Méditerranée les a suivis ainsi que leurs produits les plus prisés tels le “garum” : (Pissaladière provençale) fait de saumure de poisson fermenté, “lasa faetida” au goût d’ail très relevé, le poivre ou la cannelle.
LA CUISINE MÉDIÉVALE, du V au XVème
Le Moyen Âge, s’étend entre 476 : chute de l’Empire romain d’Occident, et 1453 : prise de Constantinople par les Turcs ou 1492 : découverte de l’Amérique.
Le Haut Moyen Âge s’étend, lui, du Ve siècle au XI - XIIe siècle.
Les tables de ce temps étaient des tables provisoires, faites de planches posées sur des tréteaux, que l’on installait avant le repas pour la démonter aussitôt après. De là l’expression “dresser la table”, c’est-à-dire la construire, et non pas, comme on l’entend aujourd’hui, disposer le couvert. Une longue nappe tombante venait cacher les disgracieux tréteaux. Elle servait également de serviette, car on mangeait surtout avec les doigts.
Devant chaque convive, point d’assiette, mais un tranchoir, grande tranche de pain rassis sur laquelle on disposait les aliments. Plus tard, cette tranche fut elle-même posée sur une planche à découper individuelle qui prit également le nom de tranchoir. Pour se servir dans les écuelles où sont présentés les mets - surtout des viandes - on pique les morceaux avec la pointe d’un couteau.
Les premiers textes culinaires en France datent de l’an 1300 environ. Il s’agit de traités à l’usage des grands de ce monde. Les documents sont beaucoup plus rares en ce qui concerne l’alimentation des paysans et petites gens.
La graisse est conservée dans de grandes jarres. Le lard, les jambons et les saucisses sont fumés après salaison. On conserve les légumes verts dans le sel, les fruits en les faisant cuire dans du miel, les herbes et les champignons en les faisant sécher.
Le pain est un aliment basique, qui se trouve à toutes les tables, et en grande quantité. À la cour comme à la ville, il est fabriqué par des spécialistes : les boulangers.
À la campagne, le four est la propriété du seigneur, les paysans viennent y faire cuire leur pain. Il s’agit toujours de pain de froment, sauf dans l’Ouest et le Centre où l’on préfère le pain de seigle ou le méteil (mélange de blé et de seigle), préférence qui se manifeste encore de nos jours.
Il en existe 3 catégories, correspondant de fait à 3 classes sociales bien distinctes : un pain très blanc, appelé “pain de bouche”, réservé aux riches, le “pain de ville”, un peu plus grossier, consommé par les artisans et petits bourgeois des villes, et enfin le “pain à tout”, très proche de notre pain complet actuel, foncé, lourd, considéré comme très grossier, destiné aux paysans et hommes de labeur.
La qualité des bêtes mises sur le marché varie bien entendu. Les
“grosses viandes” de bœuf, de mouton ou d’animaux vieux, sont
réservées aux travailleurs de force. Porc, veau et agneau sont
nourritures de riches et de nobles qui ont, dit-on, l’estomac plus
délicat.
Les médecins de l’époque déconseillent de manger des légumes. Ils les disent peu nourrissants comparativement au pain ou à la viande. Les panais, navets et autres racines, les herbes comme les épinards ou les bettes, les poireaux, pois et autres verdures restent les aliments du petit peuple, des paysans et des pauvres, même s’ils ne sont pas systématiquement négligés par quelques bourgeois soucieux d’économie.
Les fruits en revanche sont beaucoup plus prisés. Noix, noisettes, amandes, figues, cerises, raisins, pommes et poires trouvent leur place sur les tables des riches.
Longtemps. la cuisine médiévale a été dépréciée et dédaignée pour son usage, jugé excessif, des épices. La gastronomie de cette époque, fait montre d’un goût prononcé pour les mélanges fortement parfumés et savamment dosés et liés, lesquels sont à l’origine du légendaire goût français pour les sauces.
Le poivre, pas très cher, devient une épice populaire, mais reste dédaigné par les cuisiniers de l’aristocratie. En revanche, les “menues épices” c’est-à-dire : girofle, muscade, macis ou graine de paradis, sont extrêmement coûteuses, et par conséquent, fort prisées dans les grandes cuisines. S’y ajoutent galanga, poivre long, cannelle, gingembre et cardamome.
Le Viandier, l’un des plus anciens ouvrages de cuisine en langue française, mentionne 16 épices nécessaires à la confection de ses recettes.
Cette cuisine décrite par les bourgeois du XIXe siècle comme composée “d’abominables ragoûts”, est en fait une cuisine légère.
Non pas dans le sens utilisé de nos jours pour qualifier la nouvelle cuisine, mais dans la mesure où elle fait très peu usage de corps gras.
Les sauces se font à partir de vinaigre de vin ou de verjus, parfois de jus de citrons, d’oranges amères, voire de grenades et sont parfumées de mélanges d‘épices pilés au mortier. Le goût de base le plus apprécié est acide et épicé. Il arrive que l’on adoucisse ce mélange par addition de sucre. Les sauces qui accompagnent les poissons, les volailles et rôtis sont liés au pain grillé et finement moulu.
Le beurre et la crème sont dédaignés.
Les herbes qui parfument les plats ont des saveurs fortes et âcres : menthe, carvi, moutarde, hysope ou encore safran.
D’autres part, les cuisiniers d’alors accordent une importance extrême à l’effet visuel de leurs préparations.
Le vert s’obtient avec le vert de poireau ou le jus de d’épinards. Le safran, très fréquemment utilisé, mais la plus onéreuse des épices, donne le jaune. Le rouge s’obtient avec le tournesol ou le santal. Toutes sortes de substances, dont le lait ou le lait d’amandes. s’utilisent pour le blanc.
Si les recettes qui nous sont parvenues montrent qu’il s’agit d’une cuisine légère, très peu grasse, elle n’en est pas pour autant “naturelle”. Loin de vouloir conserver aux aliments leur aspect ou saveur d’origine, les cuisiniers s’efforcent de déguiser et de masquer les plats, d’où ces préparations de “bœuf comme venaison d’ours” ou “d’esturgeon contrefait de veau”.
Viandes et poissons rôtis, grillés ou frits reposent sur des
sauces liées au pain grillé. Les grosses pièces de chair et
les volailles sont cuites à la broche et les rares légumes
se présentent sous forme de purées épaisses. C’est l’âge
d’or des pâtés, (“Potjesvlees” de Flandre“) dont certains atteignent de gigantesques proportions, contenant poissons, viandes ou oiseaux entiers rôtis.
Quelques préparation peu raffinées vont avoir beaucoup de progrès à faire pour devenir les fines pâtisseries, dont elles sont les ancêtres. Les mets sucrés sont les gaufres, les oublies, les petits gâteaux (comme les talmouses qui subsistent de nos jours…), les beignets, les crêpes, les tartes au lait ou au fromage, les fruits cuits dans le miel, les pains d’épices (Le “véritable” pain d'épices) ou les fruits frais.
Quant aux boissons, la plus répandue est le vin, souvent utilisé en cuisine. Dès le Moyen Âge, les grands vignobles de France sont déjà bien établis. Tout le monde boit du vin, généralement coupé d’eau. À la fin des repas on sert souvent l’hypocras (vin cuit, sucré et épicé, ancêtre de notre vin chaud). On boit aussi du cidre et du poiré, fait avec du jus de poires, ainsi que de la bière, descendante légitime de la cervoise des Gaulois !
À cette époque, apparaît le premier grand cuisinier français. En 1326, Guillaume Tirel, fils de Normand, débute dans la vie comme garçon de cuisine de Jeanne d’Évreux, épouse du roi Charles IV. Il doit, comme tous ses congénères, faire son lent et difficile apprentissage sous les ordres des maîtres queux et d'officiers de la bouche.
Le travail est pénible, les jeunes marmitons sont souvent battus. L’enseignement repose entièrement sur la tradition orale. Puis le jeune homme devient “potagier”, c’est-à-dire spécialiste des ragoûts et des cuissons mijotées, et gravit lentement les échelons de la hiérarchie culinaire. Ses confrères l’ont surnommé Taillevent.
En 1346, il devient maître queux du roi Philippe VI, puis entre au service du Dauphin, duc de Normandie, et continue à diriger ses cuisines, lorsque celui-ci est couronné roi. Sous Charles VI, il atteint le sommet de la gloire, étant nommé écuyer de cuisine et maître des garnisons du roi. En 60 ans, il aura été au service de 5 rois. Il mourra comblé d’argent et d’honneurs, possédant des armoiries qui rappelleront sa fonction de cuisine.
Taillevent, est en quelque sorte l’ancêtre de générations d’artistes qui ont marqué à tout jamais l’histoire de la gastronomie, et même l’histoire tout court. Il a rédigé au cours de sa vie un livre de recettes, connu aujourd’hui sous le nom de Viandier de Taillevent, où il reprend les recettes de 2 précédents recueils anonymes, tout en en ajoutant d’autres de son cru.
Liber de coquina : est un autre excellent livre de cuisine, écrit en latin vers ± 1300. Il comporte 172 recettes réparties en 5 chapitres. Vraisemblablement d'inspiration italienne, il présente des similitudes notoires avec Il libro della cucina del secolo XIV de Zambrini. On trouve plusieurs recettes de ravioli, une recette de lasagnes, de tria génoises et de crozets, mais aussi une recette parlant de fromage de Brie … !
Sont également présentes plusieurs recettes d'influence étrangère. Cuisine catalane avec De brodio yspanico, qui décrit la picada, cuisine andalouse avec De limonia, De romania, De mamonia.
Beaucoup de recettes utilisent, bien sur, des plantes aromatiques, avec ou sans épices.
À noter aussi l'excellent Tractatus de modo preparandi et condiendi omnia cibaria, d'après Jean-Louis Flandrin, ce Traité de la façon de ..., serait d'origine ecclésiastique.
Écrites en latin vers ± 1300, on trouve environ 80 recettes, réparties en 5 chapitres. Certaines recettes sont très détaillées, avec temps de cuisson et description précise du processus de préparation du plat (cf II.11, recette de lapins et lièvres...).
Enfin, le plus ancien recueil de cuisine en langue française trouvé à ce jour est connu sous le nom de Petit Traité de 1306. Il contient une collection très limitée de recettes. Le second manuscrit, appelé Le Manuscrit de Sion, parce que découvert assez récemment dans Le Valais. en Suisse, comprend les principales recettes présentent dans Le Viandier de Taillevent. Ces 3 recueils représentent les origines de notre littérature culinaire.
Mais le Viandier, restera le livre de référence jusqu’au XVIIe siècle, et même au-delà.
L’importance du maître queux ou chef cuisinier, dans les maisons royales ou princières est immense. C’est un personnage considérable. Il existe des dynasties de cuisiniers, le savoir se transmet de père en fils. Le point culminant de la carrière étant atteint lorsqu’on devient écuyer de cuisine.
Plus modestement. les bourgeois des villes, même riches, ne s’offrent pas de maîtres queues, ils emploient des cuisinières, lesquelles ne jouissent pas d’un statut très élevé dans la hiérarchie domestique. Curieusement, le grand art culinaire en France semble avoir toujours été une affaire d’hommes. Pourtant. le rôle des femmes dans la gastronomie française est loin d’être négligeable.
Le recueil de recettes le plus vivant et le plus touchant n’est pas l’œuvre d’un cuisinier mais d’un bourgeois de Paris, dont on ne connaît le nom et qui décida d’écrire vers 1390, un traité de morale et d’économie domestique pour sa très jeune épouse, intitulé Le Ménagier de Paris, (Crème de petits pois - 1390)
Le Moyen Âge atteint une sorte de perfection dans l’art du festin. Le type de repas caractéristique de l’époque est bien le banquet. “Repas-spectacle”, occasion d’affirmer son rang, sa richesse et son prestige. Chez les grands de ce monde, comme chez les bourgeois qui peuvent se le permettre, le festin est donné à l’occasion de noces, d’alliances, de victoires, de naissances ou de tout autre événement important. C’est le moment par excellence qui concrétise les idéaux esthétiques et sociaux de l’époque.
Le menu se compose de plusieurs mets, que l’on appellera plus tard “services”. Le service comprend tout un ensemble de plats : rôtis, sauces, poissons ou pâtés, disposés sur la table. Chaque convive se servant de ce qu’il trouve devant lui. Les divers mets se suivent. Il peut y en avoir jusqu’à 6, voire plus. Régulièrement séparés par ce que l’on appelle logiquement les “entremets” : des spectacles offerts aux convives, c’est le début du service dit “à la française”.
Cette cuisine médiévale, aromatique, acide, légère, se retrouve par bien des aspects dans la cuisine moderne. Dénigrée pendant des siècles, elle a suscité les lentes transformations à venir des XVIe et XVIIe siècles, qui ont permis d’établir les grands préceptes de la cuisine classique.
LA RENAISSANCE - XIVème,
début
XVIIème
Période de transformation et de renouvellement socioculturel des États de l’Europe occidentale, qui s’étend de la fin du XIVe siècle au début du XVIIe siècle. Ce renouveau, eut son point de départ dans les
Cités-États d’Italie. Sans parler de rupture brutale avec le Moyen Âge, les changements dans l’économie ont engendré des mutations sociales qui ont accéléré les mutations politiques, signant par la même, la fin de la féodalité.
L’apparition de la notion d’État reste une caractéristique essentielle de la période de la Renaissance. Les autres traits marquants sont l’accroissement démographique, l’essor des techniques, comme le développement de l’imprimerie, et des échanges, l’urbanisation, la naissance d’une bourgeoisie d’affaires, l’éclat culturel exprimé par les fastes de la vie de cour, le goût de la fête et des œuvres d’art.
Si la Renaissance en France est une période de grands changements tant dans le domaine artistique que scientifique, il n’en est pas de même pour la cuisine qui évolue selon un rythme séculaire.
Dans les années 1500, le goût et les techniques semblent stagner à la table et à l’office, certains éléments se mettent en place pour amorcer la lente transformation qui verra le jour au siècle suivant.
Si l’on en croit Rabelais, sous François I , la cuisine est florissante, guidée par Pierre Pidoux et son livre La fleur de toute cuisine.
La cuisine devient un sujet d’écriture pour la première fois à cette époque. Cela va des descriptions de Montaigne sur ses préférences alimentaires, aux morceaux de bravoure de Rabelais décrivant les festins de Pantagruel ou la somptueuse abondance de l’île de maître Gaster. Ronsard lui-même, consacrera un sonnet à la salade…
À noter, un ouvrage de cuisine
: “très utile et profitable à tous. Contenant la manière d’habiller toutes sortes de viandes tant chair que poisson, et de servir banquets et festins”, une réimpression de ± 1610 du livre plus connu sous le titre de “Livre fort excellent de cuisine”, publié à Lyon en 1542.
Parallèlement, la découverte du Nouveau Monde permet l’arrivée de nouveaux produits en Europe: maïs, haricot, piment, potiron, tomate, dinde, pomme de terre, et surtout café et chocolat qui restent pour l’instant à l’état de simples curiosités pour les Français.
Après les guerres entre France et Italie, les échanges diplomatiques, les alliances et les mariages royaux, l’influence transalpine devient très marquante, notamment avec l'arrivée de la “Cour” de Catherine de Médicis.
Artichauts, nouvelles sortes de melons, pois frais et salades, s’imposent peu à peu dans les menus.
Le changement le plus frappant concerne l’usage grandissant du sucre. De denrée rarissime et à usage surtout thérapeutique, le sucre, que l’on se procure de plus en plus facilement devient un ingrédient de cuisine. L’un des premiers ouvrages de confiserie en français est rédigé par l’astrologue alchimiste Michel de Nostre-Dame, dit “Nostradamus”.
La mode italienne a également changé la table. La Renaissance voit apparaître la table fixe, telle que nous la connaissons aujourd’hui, ainsi que la fourchette, au départ considérée comme une “curiosité orientale” dont on ne se servait guère que pour piquer des aliments poisseux, comme les fruits confits.
L'’établissement d’une cuisine “classique” est en cours d’élaboration. Bien qu’aucun ouvrage de cette époque ne soit aussi précis et aussi riche en renseignements que ne l’avait été Le “Taillevent” pour les siècles précédents, il semble certain qu’une nouvelle cuisine se soit progressivement constituée entre 1500 et 1600, mais il faudra attendre le XVIIe siècle pour en trouver une trace écrite.
C'’est
aux XVIIe et XVIIIe siècles que la grande cuisine française va
établir ses règles et étendre sa domination sur ce que, à
l’époque, on considère comme le monde civilisé. Cette haute
cuisine commence à se développer dans les grands établissements
de l’aristocratie, puis dans les riches demeures particulières.
Elle devient l’affaire de cuisiniers spécialisés.
Des maisons plus modestes et bourgeoises, va émerger une cuisine que l’on appellera “bourgeoise” puis “régionale”, pratiquée par des cuisiniers non professionnels et, le plus souvent, des femmes.
Les aspirations de la bourgeoisie à toujours plus de raffinement vont accélérer l’évolution des fastes de la grande cuisine. La noblesse qui se voit imitée dans ses goûts et sa distinction va, pour garder ses distances, redoubler de fastes culinaires, lesquels seront, à leur tour, copiés par les bourgeois. Les bouleversements de la Révolution n’y changeront rien.
Au XVIIe siècle, s’opère un changement du paysage culinaire. Le premier fait marquant est le déclin du goût pour les épices. La France qui, de tout l’Occident, avait été le plus grand consommateur d’épices, ce qui lui avait valu pour la première fois son statut de grand gastronome, s’en désintéresse alors qu’elles continuent à être très appréciées dans tout le reste de l’Europe. Il n’y a plus guère que le poivre, le clou de girofle et la muscade, en quantités discrètes, qui trouvent grâce à son palais.
À cette époque, les étrangers s’étonnent même du peu d’épices utilisées en France, et les Français voyageant dans d’autres pays d’ Europe manifestent leur dégoût, comme la comtesse d’ Aulnoy qui, se rendant en Espagne en 1691, dit n’avoir rien pu manger, tant tous les mets étaient assaisonnés d’épices et de safran. Les herbes aromatiques ont également changé: l’hysope, la rue, la marjolaine, la menthe ou la tanaisie disparaissent et sont remplacées par le thym, le laurier, le persil, la sarriette, la ciboulette, l’estragon et le romarin.
Transformation due au fait qu’au XVIIe siècle, le beurre est
autorisé durant le Carême et les jours de jeûnes.
Son ouvrage se vendra jusqu’à la moitié du XVIIIe siècle!
La réduction est une nouvelle technique pour donner consistance aux sauces. Conservées dans des récipients séparés, afin d’être utilisées dans la confection de diverses préparations. L’événement est de taille dans l’histoire des techniques culinaires.
L’autre grande innovation est l’apparition des jus et des coulis, ancêtres des fonds, dont les cuisiniers développeront toute une théorie au XIXe siècle. Les jus sont des déglaçages de viandes rôties dans des récipients couverts, qui peuvent être réservés à divers usages, et les coulis sont très proches des fonds modernes. Pierre de Lune dans Le Cuisinier, rédigé en 1656, et le dernier des grands cuisiniers du XVIIe, Massaliot n’en mentionnent pas moins de 23 recettes différentes.
Enfin, la séparation rigoureuse qu’établissent les Français
entre le salé et le sucré se met vraiment en place à cette
époque.
Tandis que l’aristocratie se distingue en érigeant en règle dans
ses cuisines ce qui doit être “le bon goût”, la bourgeoisie qui
lui emboîte le pas, devient un public assidu des nouveaux livres
de cuisine. Tel : Le Jardinier François et les Délices de la
campagne, parus en 1654, de Nicolas de Bonnefons, 1er valet de
chambre du jeune Louis XIV. Celui-ci, en fervent moderniste,
énonce en précepte de base que les aliments doivent garder le
goût que leur a conféré la nature.
L
Il s’agit de repas servis pour un nombre très restreint de convives, avec un minimum de domestiques et où la qualité de la cuisine est de tout premier ordre. Le “bon goût” s’allie désormais à une intimité faite de convivialité.
Dans les grandes cuisines règne une querelle sans merci, qui divise toujours avec autant
Tous les grands auteurs culinaires de l’époque sont d’accord pour que l’on fasse table rase de l’encombrante cuisine des siècles précédents.
La cuisine des
aristocrates reste une affaire d’hommes, et il faut aller
jusqu’en Angleterre pour trouver des femmes “maîtres d’hôtel” (housekeeper). Menon, a la particularité de s’adresser dans ses écrits à 2 couches différentes de la société; à l’aristocratie avec ses Soupers de la cour, où il donne force conseils à la fois théoriques et techniques aux cuisiniers professionnels, et à la bourgeoisie avec sa Cuisinière bourgeoise, ouvrage plein de bon sens, plutôt destiné aux femmes et rempli de recettes fondées sur les produits du jardin et du marché. Ce dernier ouvrage remplacera Le Cuisinier François dans la liste des ouvrages de référence jusqu’au début du XIXe siècle.
Vincent de la Chapelle, autre cuisinier de renom officiant en Angleterre et grand voyageur, rédige Le Cuisinier moderne. Comme Marin, il énonce les bases théoriques de la grande cuisine. Sa “sauce espagnole” est toujours un classique. Dans le siècle suivant, il sera fort admiré par les grands cuisiniers, même si son recueil reprend plus d’un tiers des recettes des Soupers de la Cour de Menon
Dans ce siècle où se mettent en place les théories scientifiques modernes, où la philosophie est en pleine effervescence et où la Révolution se prépare, la cuisine suit un parcours assez particulier. Chez les aristocrates et chez les très riches, elle est d’un raffinement et d’un luxe extrême et exige une main-d’œuvre très spécialisée. Un menu d’apparat se compose alors de 4 services, comprenant plusieurs plats chacun (soit
± 2 par convive), plus un 5ème service de “dessert”, préparé à l’office et comportant confiseries, glaces pâtisseries et autres friandises.
Dans la bourgeoisie, faute de pouvoir suivre les tendances aristocratiques, on pratique une sorte de cuisine de compromis, en simplifiant et diminuant plats et ingrédients. Menon l’avait compris et il connaissait bien le public qui allait se ruer sur sa Cuisinière bourgeoise.
L’aristocratie éclairée ne dédaigne pas cette cuisine bourgeoise soit par souci de santé, soit aussi a la lumière des “nouvelles idées” par souci d’égalité. Un livre comme La maison rustique suite logique en quelque sorte aux Délices de la campagne du siècle précédent fait beaucoup pour propager dans les familles de province les principes de la cuisine bourgeoise qui comme toute cuisine de cette époque est essentiellement parisienne.
C’est à Paris que l’approvisionnement est le meilleur. Tous les chemins y mènent, les meilleurs produits du pays et des autres régions du monde s’y concentrent. Les grands cuisiniers ne peuvent véritablement officier que dans la capitale.
Thé, café et chocolat ne sont plus considérés comme de curieuses nouveautés. Les premiers cafés parisiens font leur apparition. On y sert, bien sur, du café et on y discute avec véhémence des questions politique du jour. L’italien Procope, ouvre un café où il sert également des glaces. C’est une nouveauté, la fabrication de glaces ou de
sorbets étant jusqu’à là le fait d’établissements aristocratiques.
Les légumes du Nouveau Monde sont devenus courants, même la pomme de terre, grâce aux efforts d’un certain Parmentier. Le pâté de foie gras (Tourte
de foie gras d'Alsace), spécialité régionale d’Alsace, connaît une vogue qui ne fera que s’accroître et, en Normandie, une certaine Marie Marel dans son village de Camembert prépare un fromage qui fera les délices du monde entier.
En 1765, un certain Boulanger, dénommé aussi Champ d’Oiseaux, ouvre une sorte de petit cabaret dans la rue des Poulies (aujourd’hui rue du Louvre), où il sert des “restaurants”, des bouillons a ses clients. Il offre également des volailles bouillies au gros sel et des œufs frais. N’étant pas traiteur, il n’a pas encore le droit à cette époque de vendre ragoûts ou plats en sauce...
En 1789, Antoine de Beauvilliers, qui a dirigé les cuisines de la Maison royale. ouvre à paris, rue Richelieu près du Palais-Royal, le premier restaurant tel que nous le concevons.
Comme à son ouverture, son établissement était très fréquenté par des aristocrates, Beauvilliers est emprisonné durant 18 mois sous la Terreur, mais a la chance de sauver sa tête. Lors de sa sortie. il ouvre un autre restaurant, Galerie de Valois. toujours au Palais-Royal, qui deviendra un haut lieu de la gastronomie.
Les restaurants se multiplient à Paris sous la Révolution.
Les aristocrates ont fui et leurs cuisiniers et maîtres d’hôtel se retrouvent sans emploi. Ils n’ont d’autre solution que de se faire restaurateurs. Certains, comme Beauvilliers, Méot ou Véry deviennent des célébrités nationales. L’ère des grands restaurants a commencé !
Époque enthousiaste, voire tragique, où se côtoient, festins et famines. Les dirigeants révolutionnaires sont souvent de fameux gourmands. Même chez les condamnés, on festoie. Restaurateurs et traiteurs ont des contrats avec les prisonniers qui en ont les moyens, et qui se font servir d’exquises nourritures avant d’aller à la guillotine!
La haute cuisine est descendue dans la rue, les grands chefs ont des restaurants, et n’importe quel citoyen, du moment qu’il a de l’argent, peut manger comme le faisaient les grands aristocrates disparus. Sous le Directoire et jusqu’au début de l’Empire, lorsque s’éloignent enfin les horreurs de la Terreur, l'on assiste à une frénésie de gourmandise et jouissance, une envie irrépressible de plaisir: la France se remet à vivre.
Le premier à avoir eu l’idée de publier une revue gastronomique fut Grimaud de La Reynière. Gourmand obsessionnel, il est le créateur des premiers “labels”, un ancêtre du Michelin ou du Gault et Millau.
Cependant, le plus grand écrivain sur la gastronomie fut sous Napoléon, Jean-Anthelme Brillat-Savarin 1755-1826 . (Fondue “Brillat-Savarin”). Sans être cuisinier, ce très fin gourmet et homme du monde écrivit un ouvrage qui fit date dans la littérature gourmande : La Physiologie du goût (1828) ou Méditations de gastronomie transcendante (1826). Malgré son titre assez rébarbatif, à défaut
de recette, l’ouvrage offre une passionnante série de réflexions sur la gastronomie. On y découvre une foule d’anecdotes et de souvenirs de repas simples ou mémorables.
Les petits soupers du XVIIIe siècle, avec leur raffinement dans la séduction. Sont remplacés par des repas intimes, dont le seul but est la jouissance des papilles. À ces agapes en comité restreint s’oppose, tout au long de ce siècle riche en événements politiques et diplomatiques, une grande cuisine vouée au gigantisme. Le Chef incontestable de ces généraux et stratèges des banquets est Antonin Carême. Quel tour de force fut le sien, quand il eut à composer, réaliser et diriger les opérations d’un grand repas comme celui du 12 février 1816 dans le théâtre l’Odéon en l’honneur de la Garde nationale. Les convives étaient plus de 3000 !
Paris ne produit plus rien. On y fait plus pousser de légumes depuis bien longtemps, les moutons, porcs et vaches ont disparu des ruelles et arrières-cours. Mais, la capitale est devenue le lieu où convergent les meilleurs produits des “4 coins” du globe. Nous assistons à une belle extension du centralisme culinaire, déjà bien amorcé au XVIIIe siècle.
La France de cette époque imagine être le phare culturel des sociétés civilisés, le nombril du monde. Paris est donc la capitale mondiale de la cuisine et du goût.
Les conditions de travail ont considérablement évolué dans les cuisines. Non seulement le fourneau a fait son apparition, mais il est même en fonte et de plus en plus perfectionné. Cette merveille de modernité permet désormais de rôtir, cuire au four, braiser, griller...
Durant ce siècle, que l’on a qualifié peut-être un peu trop arbitrairement : “Âge d’or de la gastronomie française”, vont s’affirmer les grands principes de la technique culinaire, qui en feront le modèle de la gastronomie internationale. Des fourneaux des grands cuisiniers vont naître des plats qui feront le tour de la planète et deviendront de grands classiques.
Paradoxalement, les 2 inventions techniques les plus fondamentales pour le traitement des aliments, à savoir la conserve par stérilisation découverte par Nicolas Appert et réfrigération mise au point par Ferdinand Carré, n’auront aucune incidence sur la cuisine à cette époque.
Dans ce siècle, la cuisine s’approprie les signes distinctifs de la société bourgeoise, à savoir la recherche des valeurs sûres et de la stabilité. Les recettes s’alourdissent et incorporent des quantités tout à fait considérables de beurre et autres corps gras, qui n’arrondissent pas que les saveurs...
Les cuisiniers du XIXe siècle, vont rivaliser d’ardeur et d’originalité afin de présenter les pièces extravagantes en sucre. massepain, graisse, viande ou toute autre substance modelable.
Nous voilà dans le siècle de la réussite ventripotente!
Vers 1750. les couverts de table trouvent leur forme définitive, et de nombreux modèles d'orfèvrerie dessinés à cette époque sont toujours produits aujourd'hui. Le couvert s’enrichit de la petite cuillère. La table accueille nombre d’ustensiles de service nouveaux :
la louche, alors dénommée “cuillère à pot”, les cuillères à sel, à moutarde, à ragoût, à olives, à sucre en poudre... Ainsi que la saucière, le moutardier, l’huilier-vinaigrier, le beurrier, le sucrier à poudre...
La faïence commence à concurrencer
Un autre changement fondamental va s’opérer : la transformation du service des repas. Dès le début du siècle, on peut voir dans la littérature culinaire la description de ce qui est appelé le service “à la russe”. Il s’agit, en fait, de servir les divers plats du repas les uns après les autres, en les présentant directement au convive. Les mets sont découpés et arrangés en cuisine, et peuvent être consommés chauds, dans la perfection de leur préparation.
Ce changement a une autre conséquence : désormais, les verres sont disposés sur la table. devant les convives. Ils font partie du décor, et les manufactures inventent alors les services de verres à vin, à madère, à liqueur, à champagne...
Les théoriciens du XIXe siècle, les décrivent par un fonds, ou un coulis de base, additionné d’une liaison et d’un jus de cuisson, auxquels s’ajoutent des garnitures. Le résultat est une “sauce capitale” ou “grande sauce” qui servira à son tour de base pour d’autres sauces.
Une exception, tout à fait notable cependant : Édouard Nignon. Homme, peu connu du grand public, mais nombreux sont les chefs contemporains qui lui sont redevables. Il officia dans toutes les grandes maisons de Paris, entre autres, à la Maison Dorée et au café Anglais et fut sollicité par le
tsar, l'empereur d'Autriche et le président Wilson. Il est l’auteur d’un ouvrage merveilleux mais peu connu, L’Héptaméron des gourmets ou Les Délices de la table, l’un des plus beaux livres de cuisine du XXe siècle.
Mais dans la cuisine régionale, bien sûr!
Dans cette bonne vieille cuisine bourgeoise, sans pareille pour mitonner de petits plats traditionnels et savoureux. Une révolte semble s’imposer contre le centralisme parisien, contre l’uniformité et la standardisation rigide de gastronomie devenue internationale.
En 1923 s’organise à Paris les 8 jours de la “Gastronomie régionaliste”, sous la direction d’Augustin de Croze.
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La gastronomie se veut scientifique.
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1936 | 1939 | 1943 |
Dans les années 1960, le discours des nutritionnistes et des diététiciens se fait fortement entendre. L’image idéale du corps a changé, ainsi que les notions d’esthétique. La diététique médicalisée se vulgarise et, dans l’esprit des Français, se met en place la non-compatibilité du bon et du sain, de la gastronomie et de la diététique. Dilemme! Problème de fond, qui se pose à un peuple dont l’expression culinaire fait intrinsèquement partie de la culture...
Il fallait innover, réinventer, réconcilier bonne cuisine et bonne santé, et ce fut le fait d’un très grand cuisinier de ce siècle: Michel Guérard. Les choses vont enfin bouger. Henri Gault et Christian Millau, journalistes gastronomiques quelque peu iconoclastes envers sa majesté Michelin, se joignent à Guérard pour lancer “la nouvelle cuisine”. L’histoire semble alors se répéter quelque peu, car nous nous trouvons, comme nos ancêtres de 1600, dans une période de profond remaniement en matière d’art culinaire.
Il s’agit donc d’un retour aux valeurs anciennes, mais, faisant appel aux techniques nouvelles.
Les types de cuisson se développent considérablement avec la vapeur, puis le micro-ondes.
Dans les années 80, la diversification des produits est telle, que les cuisiniers ont à leur portée à peu près toutes les denrées alimentaires de la planète. Dans leur zèle explorateur, certains ont pu commettre des plats aussi baroques que la morue aux fraises ou le turbot aux kiwis ou encore la salade
“rive gauche”
La Varenne, en 1661, dans Le Cuisinier François, nous donnait bien une recette de “Poulet d’Inde à la framboise farci” !
On ne se libère pas de 150 années de répétitions respectueuses de recettes des maîtres anciens sans quelques excès...
La cuisine française ne s’est jamais
aussi bien portée !
Aujourd'hui, au quotidien...
La table n'a plus le monopole des repas
Se mettre à table est une habitude encore
vivace, mais plus systématique. 1 Français sur 2 se prépare un
plateau-repas au moins 1 fois par semaine, selon le Crédoc
(seulement 1 sur 3 en 1995). On mange devant la télé sur le canapé,
sur un coin du bar, sur son lit, en surfant sur le Net...
La plupart des produits nomades, conçus pour être mangés hors de la
maison, sont en fait consommés à domicile...
Des repas simplifiés
La trilogie entrée-plat-dessert est de moins en moins pratiquée à
table. On estime que 67% des Français ne mangeront que 2 plats sur 3
au dîner à l'horizon 2020.
C'est un des principaux effets de la
diminution du temps consacré à la préparation des repas du soir. Il
n'a cessé de diminuer depuis les années 70 et se stabilise autour de
40 min depuis la fin des années 90. Depuis 1988, le temps de
préparation des repas du week-end diminue aussi, sous l'effet de
l'arrivée à l'âge adulte de nouvelles générations moins habituées à
cuisiner : entre 1988 et 2003, il est passé de 60 à 46 min pour
arriver à 33 en 2009.
Des horaires de repas plus flexibles
Fini le
sacro-saint dîner devant le 20 h. L'horaire du repas doit composer avec les
rythmes de chacun. La proportion de Français qui ne dînent pas à heure fixe
ne cesse d'augmenter, selon les enquêtes du Crédoc. Ils sont 25 % en
2008 alors qu'ils étaient seulement 15% en 1995. Il s'agit d'un véritable
phénomène de génération et non d'un simple effet d'âge. Cette proportion
atteindra 31 % en 2020.
Le repas perdure mais
s'étale dans le temps et l'espace. On assiste à des transferts. Le
midi, on mange une grosse salade et on boit un café. On s'offre un
dessert plus tard, vers 16 h.
Vive la convivialité!
Quel que soit
l'âge, manger ensemble reste très important: le temps passé à table est de
85 min par jour contre 38 min aux États-Unis.
Nous
invitons plus qu'avant, même si notre façon de recevoir évolue: un apéritif
qui se prolonge, un pique-nique, un barbecue ou même un plateau repas dans
17% des cas.
Une envie d'exotisme
En 2008, 50,6 % des Français consommaient des aliments exotiques
(36,4 % en 1995).
"II y a les voyages, mais pas seulement. Les jeunes sont plus
ouverts sur le monde parce que la société est multiculturelle",
souligne Pascale Hébel, directrice du département consommation du Crédoc.
La cuisine est un loisir
La cuisine va-t-elle devenir une pièce
inutile?
Non. D'abord parce que 94 % des français pensent que bien
manger fait partie des plaisirs de la vie. Ensuite plus de 2 sur 3
affirment aimer cuisiner.
Son aspect corvée s'allège, la cuisine
devient un loisir, une activité relaxante que l'on pratique
occasionnellement, pour se faire plaisir et en faire profiter son
entourage.
Le succès des cours de cuisine en témoigne. Autre motivation,
l'envie de mieux contrôler ce que l'on mange suscite, selon les
sociologues, un retour aux fourneaux de la génération des années
67/76 et des retraités.
L'avant-garde
Nous ne sommes plus dans la cuisine française mais dans une tendance...
Élu plusieurs années consécutives meilleur Chef du monde, même s'il inspire des chefs des 5 continents, l'Espagnol Ferran Adrià (1962-...), à la fois pape et trublion d'une nouvelle façon de cuisiner et de manger, reste assez peu connu du grand public.
Son restaurant "El Bulli", sur la côte catalane, n'est
ouvert que d'avril à septembre!
Chaque année, 10 000
demandes de réservation affluent du monde entier, mais seuls quelques
± 3000
élus vivront l'expérience unique d'un repas de 25 plats chez ce chef
visionnaire.
L'automne et l'hiver ? Il les passe dans son atelier, entouré d'une nuée de chefs et d'apprentis. Il travaille et cherche :
"La question que je me pose sans arrêt, c'est pourquoi ?"
Le premier, il a eu l'idée d'appliquer à la cuisine des
techniques relevant de la science, pour découvrir des textures et des
saveurs totalement inédites jusque-là.
"Pour la millième fois, je répète que je ne fais pas
de la cuisine moléculaire ! mais j'aime manger d'avant-garde", affirme-t-il haut et fort.
Il reste un homme simple, très abordable malgré
son immense notoriété dans le monde de la gastronomie.
"Le goût, c'est relatif; la cuisine, elle, est bien ou mal faite."
Pour lui, tout est source d'investigation,
du plus humble au plus luxueux des produits, et toutes les cultures
culinaires lui inspirent une grande curiosité.
Que l'on déguste de l'air de
carottes, des chamallows de parmesan, un sorbet grillé au barbecue, ou de la
nougatine aux algues..., la surprise est si grande qu'il faut se concentrer
pour "vivre l'expérience" dont parle Ferran Adrià.
Pionnier, génial inventeur, mais cuisinier avant tout.
Pendant ce temps,
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